Prime indue : 20 ans de versement suffisent à en faire un élément de rémunération
Dans un arrêt du 4 décembre 2024 (n° 23-19528 FD), la Cour de cassation confirme qu’une prime versée par erreur sur une longue période peut devenir un élément de rémunération.
Dans ce cas, l’employeur ne peut pas cesser unilatéralement son versement, même s’il invoque une erreur.
Une prime d’ancienneté versée à tort pendant 20 ans
Dans cette affaire, une salariée avait perçu une allocation d’ancienneté de 1994 à 2014, alors qu’elle ne remplissait pas les conditions prévues par la convention collective.
En 2015, l’employeur avait cessé ce versement, arguant d’une erreur.
La salariée avait alors saisi la justice pour réclamer la reprise du paiement de la prime.
Le principe : une erreur peut créer un droit
En règle générale, une somme versée par erreur n’est ni un droit acquis ni un usage, et son versement peut être interrompu (Cass. soc., 10 mai 1979, n° 78-40296).
Cependant, une erreur persistante sur une longue durée peut devenir inexcusable et entraîner la contractualisation du versement.
La somme en question devient alors un élément de rémunération, obligeant l’employeur à continuer son paiement.
Dans le cas présent, la Cour de cassation a estimé que, par son paiement régulier et prolongé sur 20 ans, l’allocation d’ancienneté était devenue un élément de la rémunération de la salariée, indépendamment des conditions prévues par la convention collective.
Les obligations de l’employeur
La Cour rappelle que les conventions doivent être exécutées de bonne foi (article 1134 du Code civil, dans sa version applicable à l’époque des faits).
En cessant unilatéralement le paiement de la prime après 20 ans, l’employeur manquait à cette obligation.
Conséquences pour les DRH
Cet arrêt illustre les risques liés à une erreur répétée dans le versement de primes ou d’avantages. En cas d’erreur prolongée, le versement peut être assimilé à un élément de rémunération, rendant sa suppression unilatérale illégale.
Références juridiques :
• Article 1134 du Code civil (version en vigueur au 10 février 2016).
• Cour de cassation, chambre sociale, 4 décembre 2024, n° 23-19528 FD.