Congé sans solde pris sans autorisation : l’employeur ne peut pas sanctionner un salarié s’il l’a toujours empêché de partir en congés
Dans un arrêt du 22 janvier 2025, la Cour de cassation rappelle que si un salarié ne peut pas partir en congé sans l’accord de son employeur, la situation est différente lorsque ce dernier fait systématiquement obstacle à la prise des congés payés.
Une faute du salarié peut alors être tempérée, voire excusée, et un licenciement pour faute grave peut être requalifié.
1/ Le rôle de l’employeur dans la prise des congés payés
L’employeur joue un rôle déterminant dans la gestion des congés :
- Il fixe la période de prise des congés et l’ordre des départs, sauf disposition conventionnelle contraire (Code du travail, articles L. 3141-13, L. 3141-15 et L. 3141-16).
- Il doit informer chaque salarié de ses dates de congés au moins un mois à l’avance (Code du travail, article D. 3141-6).
- Il doit garantir l’effectivité du droit à congés et prouver qu’il a pris toutes les mesures pour permettre au salarié de les exercer (Cour de cassation, chambre sociale, 13 juin 2012, n°11-10929).
Si l’employeur ne répond pas aux demandes de congés, il peut être tenu responsable d’une privation de droit.
2/ L’affaire jugée : une salariée contrainte de prendre un congé sans solde
Une assistante sociale avait demandé un congé du 30 juillet au 27 août 2018.
Faute de réponse de son employeur, elle avait sollicité un congé sans solde du 15 juillet au 28 août, pour se rendre auprès de sa mère malade.
N’ayant toujours pas de réponse, elle était partie en congé le 24 juillet.
L’employeur lui avait alors ordonné de reprendre son poste et, faute de réponse, l’avait licenciée pour faute grave.
Devant la cour d’appel, la salariée avait invoqué le fait que, depuis son embauche trois ans plus tôt, l’employeur ne lui avait jamais accordé de congés.
La cour d’appel n’avait pas retenu cet argument, jugeant que l’employeur pouvait valablement lui reprocher son absence non autorisée.
La salariée s’est alors pourvue en cassation.
3/ Un employeur qui refuse les congés ne peut reprocher au salarié de partir sans autorisation
La Cour de cassation casse la décision des juges d’appel, rappelant que tout jugement doit être motivé.
- Le fait que l’employeur ait empêché la salariée de prendre des congés depuis trois ans devait être examiné.
- Un employeur qui ne permet jamais à un salarié d’exercer son droit à congés ne peut valablement lui reprocher d’avoir pris un congé sans solde sans autorisation.
📌 À noter : En principe, un salarié ne peut pas partir en congé sans accord préalable (Cour de cassation, chambre sociale, 13 décembre 2023, n°22-17890).
Cependant, un employeur qui ne prend pas les mesures nécessaires pour garantir l’exercice effectif du droit aux congés peut être condamné à verser des indemnités.
4/ Une possible requalification du licenciement
Les juges d’appel devront réexaminer l’affaire, car si l’employeur a systématiquement empêché la salariée de prendre des congés, le licenciement pour faute grave pourrait être requalifié :
- Soit en faute simple, limitant ainsi les conséquences financières pour la salariée.
- Soit en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ouvrant droit à des indemnités pour la salariée.
L’affaire est donc renvoyée devant une autre cour d’appel.
📌 Référence : Cour de cassation, chambre sociale, 22 janvier 2025, n°23-16282 D.