Discrimination syndicale : la preuve du préjudice n’est pas requise pour obtenir réparation
1. Un salarié victime de discrimination syndicale conteste son licenciement
Un salarié, délégué du personnel, est déclaré inapte le 6 mai 2019.
Son employeur, après avoir échoué à obtenir l’autorisation de licenciement pendant la période de protection, le licencie pour inaptitude hors période protégée, le 16 juin 2020.
Il saisit alors les prud’hommes, invoquant une discrimination syndicale et réclamant des dommages-intérêts pour préjudice moral (article L. 1132-1 du code du travail ; article L. 2141-5 du code du travail).
2. La cour d’appel reconnaît la discrimination mais refuse d’indemniser sans preuve du préjudice
La cour d’appel admet l’existence d’une discrimination syndicale, en se fondant sur les éléments du dossier (notamment le refus d’autorisation de licenciement par l’inspection du travail).
Mais elle refuse d’accorder des dommages-intérêts au salarié, au motif que ce dernier n’apporte aucun élément justifiant la réalité de son préjudice.
3. La Cour de cassation opère un revirement : le préjudice est nécessairement présumé
La Cour de cassation casse l’arrêt.
Elle juge que :
« Le seul constat de l’existence d’une discrimination syndicale ouvre droit à réparation, sans que le salarié ait à démontrer l’existence d’un préjudice. »
(article L. 2141-8 du code du travail)
Elle rappelle que toute mesure discriminatoire liée à l’activité syndicale constitue une violation d’un principe fondamental, et doit donner lieu à indemnisation automatique.
Cette solution s’inscrit dans la logique du préjudice nécessaire, déjà admis dans d’autres domaines (ex. : atteinte à la vie privée, non-respect des libertés fondamentales, etc.).
4. Le juge ne peut refuser d’indemniser ni se contenter d’une reconnaissance symbolique
La Cour de cassation rejette l’argument de la cour d’appel selon lequel la seule satisfaction morale d’avoir obtenu la reconnaissance d’une discrimination suffirait à réparer le préjudice.
Le salarié doit recevoir une indemnisation effective.
Il appartient au juge du fond d’en fixer le montant.
📌 Cass. soc. 10 septembre 2025, n° 23-21124 FSB