Congés payés et arrêts maladie : la Cour de cassation précise l’application des règles en vigueur lors des pourvois en cours
Dans un arrêt du 2 octobre 2024 (Cass. soc. 2 oct. 2024, n°23-14.806 FS-BR), la Cour de cassation a clarifié les règles applicables aux pourvois concernant l’acquisition de congés payés durant les arrêts maladie, lorsque les décisions des cours d’appel ont été rendues avant l’entrée en vigueur de la loi du 22 avril 2024.
Ce texte législatif a modifié les règles d’acquisition des congés payés pendant les arrêts de travail pour maladie, mais ne s’applique pas rétroactivement aux décisions rendues avant son entrée en vigueur.
Les faits à l’origine du pourvoi
Le litige concerne une salariée licenciée pour inaptitude après cinq années d’arrêt maladie, durant lesquelles elle a réclamé à son employeur le paiement de plus de 6 000 € d’indemnités pour congés payés non perçus. La Cour d’appel de Bourges, en novembre 2022, avait rejeté sa demande en s’appuyant sur la législation en vigueur à l’époque, qui limitait l’acquisition des congés payés à un an pour les arrêts d’origine professionnelle (article L. 3141-5 du code du travail).
La salariée a alors formé un pourvoi en cassation, examiné après la promulgation de la loi du 22 avril 2024, qui a supprimé cette limitation.
Application des anciennes dispositions en cas de décisions antérieures à la loi de 2024
La Cour de cassation a jugé que, conformément au principe de sécurité juridique, elle devait statuer en appliquant les règles en vigueur au moment où la cour d’appel a rendu sa décision. Ainsi, les dispositions du Code du travail dans leur rédaction antérieure à la loi du 22 avril 2024 ont été retenues pour examiner le pourvoi.
Invocation de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne
Toutefois, la Cour de cassation a permis à la salariée d’invoquer l’article 31 § 2 de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui stipule que tout travailleur a droit à une période annuelle de congés payés. Cette disposition, reconnue d’application directe dans les litiges entre salariés et employeurs privés, avait déjà servi de base à la jurisprudence établie par les arrêts du 13 septembre 2023. La Cour a donc écarté les dispositions nationales contraires à cette Charte.
Mise à l’écart des règles nationales contraires
La Cour de cassation a écarté partiellement l’application des articles L. 3141-3 et L. 3141-5 du Code du travail dans leur ancienne rédaction, car ils subordonnaient l’acquisition de congés payés à l’exécution d’un travail effectif.
Ces règles, jugées contraires à la Charte européenne, ont été remplacées par celles permettant aux salariés de cumuler des droits à congés payés pendant les périodes de suspension du contrat de travail, même en cas d’arrêt maladie.
Conséquences pour les salariés et les employeurs
La Cour a renvoyé les parties devant la Cour d’appel d’Orléans, précisant que les salariés concernés par des arrêts maladie antérieurs à la loi de 2024 pourraient toujours invoquer l’article 31 § 2 de la Charte pour réclamer leurs droits à congés payés.
Il est à noter que, pour les litiges soumis à la loi nouvelle, les dispositions de la loi du 22 avril 2024 ne sont pas rétroactives.