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9 Jan 2025

Rupture du contrat de travail : des faits anciens peuvent justifier une prise d’acte aux torts de l’employeur

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La Cour de cassation rappelle dans un arrêt du 18 décembre 2024 que l’ancienneté des manquements de l’employeur ne suffit pas, à elle seule, à qualifier une prise d’acte en démission.
Les juges doivent évaluer la gravité des manquements et leur impact sur la poursuite du contrat de travail.

1/ Prise d’acte : un mécanisme pour dénoncer les manquements graves de l’employeur

Le salarié en contrat à durée indéterminée peut prendre acte de la rupture de son contrat de travail en raison de manquements graves reprochés à son employeur.

La prise d’acte conduit à une saisine du conseil de prud’hommes qui doit qualifier cette rupture :
• soit en licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou nul pour les salariés protégés (article L. 1231-1 du Code du travail) ;
• soit en démission si les faits reprochés ne justifient pas la rupture (Cass. soc., 16 novembre 2004, n°02-46048).

Pour justifier une prise d’acte, les manquements de l’employeur doivent être suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat (Cass. soc., 30 mars 2010, n°08-44236).

2/ Les faits : des manquements jugés sérieux mais anciens

Dans cette affaire, un salarié contestait une baisse de rémunération consécutive à des réorganisations survenues en 2018 et 2019.

Après avoir pris un congé parental de six mois, il a pris acte de la rupture de son contrat le 31 août 2020, invoquant ces manquements.

Les juges du fond ont reconnu que ces faits étaient graves mais ont estimé que leur ancienneté suffisait à qualifier la prise d’acte en démission.

L’ancienneté des faits ne suffit pas à justifier une démission

La Cour de cassation a censuré cette décision.

Elle rappelle que les juges ne peuvent pas se fonder uniquement sur l’ancienneté des faits pour qualifier une prise d’acte en démission.

Ils doivent examiner la gravité des manquements reprochés et vérifier s’ils rendaient impossible la poursuite du contrat de travail, peu importe l’ancienneté des faits (Cass. soc., 26 mars 2014, n° 12-23634).

La jurisprudence a déjà tranché en ce sens dans des affaires où le salarié avait pris un congé ou était en arrêt de travail avant la prise d’acte (Cass. soc., 11 décembre 2015, n° 14-15670 ; Cass. soc., 28 septembre 2022, n° 21-12546).

3/ Une nouvelle analyse à venir

L’affaire est renvoyée devant une autre cour d’appel.

Les juges devront cette fois évaluer si les manquements sérieux constatés rendaient impossible la poursuite du contrat, indépendamment de leur ancienneté.

Cass. soc., 18 décembre 2024, n° 23-19664 D