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4 Fév 2025

Responsabilité pécuniaire du salarié : une distinction entre juge civil et juge pénal

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Dans un arrêt du 14 janvier 2025, la chambre criminelle de la Cour de cassation rappelle que si la responsabilité pécuniaire d’un salarié envers son employeur ne peut être engagée devant le juge civil qu’en cas de faute lourde, cette exigence ne s’applique pas devant le juge pénal.

 

Lorsqu’un salarié commet une infraction pénale dans l’exercice de ses fonctions, l’employeur peut obtenir réparation de son préjudice sans avoir à prouver une intention de nuire.

 

1/ Le principe : la responsabilité du salarié devant le juge civil

La jurisprudence impose une condition stricte pour que l’employeur puisse obtenir réparation devant le juge civil :

  • La responsabilité pécuniaire du salarié ne peut être engagée qu’en cas de faute lourde, qui suppose une intention de nuire (Cour de cassation, chambre sociale, 11 mars 1998, n°97-41920).
  • La simple commission d’un acte préjudiciable ne suffit pas : il faut prouver la volonté du salarié de causer un préjudice à l’employeur (Cour de cassation, chambre sociale, 22 octobre 2015, n°14-11291).
  • Par exemple, un salarié ayant détourné des clients et des commissions au détriment de son employeur a été condamné à lui verser 1,3 million d’euros de dommages et intérêts (Cour de cassation, chambre sociale, 21 avril 2022, n°20-22773).

2/ L’exception : la responsabilité du salarié devant le juge pénal

Lorsque le salarié est reconnu coupable d’une infraction pénale commise dans le cadre de son travail, l’employeur peut se constituer partie civile pour obtenir réparation de son préjudice.

Dans ce cas :

  • Il n’est pas nécessaire d’établir une faute lourde (Cour de cassation, chambre criminelle, 14 novembre 2017, n°16-85161).
  • Le juge pénal ne recherche que deux éléments :
    • L’existence d’une infraction pénale commise dans le cadre de l’activité professionnelle.
    • Un préjudice subi par l’employeur du fait de cette infraction.

3/ L’affaire jugée : un salarié condamné à indemniser son employeur

Dans cette affaire, un salarié avait été condamné pour conduite après usage de cannabis et excès de vitesse, infractions commises avec le véhicule de l’entreprise.

 

Il avait eu un accident, endommageant le véhicule de la société.

 

L’employeur, qui s’était constitué partie civile au procès pénal, avait obtenu du salarié le remboursement des frais de dépannage et de réparation.

 

Le salarié a contesté cette décision, arguant que sa responsabilité pécuniaire ne pouvait être engagée qu’en cas de faute lourde.

 

4/ La décision de la Cour de cassation

La chambre criminelle rejette l’argument du salarié et valide la décision du juge pénal.

Elle rappelle que :

  • Dès lors qu’une infraction pénale est reconnue, la responsabilité du salarié peut être engagée sans qu’il soit nécessaire de prouver une faute lourde ou une intention de nuire.
  • Le juge pénal était donc fondé à condamner le salarié à indemniser son employeur pour le préjudice matériel subi.

5/ Ce qu’il faut retenir

La responsabilité pécuniaire du salarié peut être engagée selon deux procédures distinctes :

  1. Devant le juge civil, uniquement en cas de faute lourde, c’est-à-dire en présence d’une intention de nuire à l’employeur.
  2. Devant le juge pénal, dès lors que le salarié a commis une infraction pénalesans qu’il soit nécessaire de prouver une faute lourde.

📌 Référence : Cour de cassation, chambre criminelle, 14 janvier 2025, numéro 24-81365 FB.