Quand l’état de santé mentale du salarié s’invite dans le licenciement disciplinaire
Un licenciement pour faute grave suppose que les faits reprochés soient imputables au salarié.
La Cour de cassation, dans un arrêt du 5 mars 2025, rappelle qu’un trouble psychique sévère, altérant le discernement du salarié, peut remettre en cause cette imputabilité et priver le licenciement de cause réelle et sérieuse.
1. Une série de messages insultants et menaçants
Le 28 février 2019, un salarié envoie à une collègue une série de SMS à caractère sexuel, insultants et dégradants.
La salariée dépose une main courante et alerte la direction.
L’employeur engage une procédure disciplinaire :
- 1er mars 2019 : Mise à pied conservatoire.
- 29 mars 2019 : Licenciement pour faute grave.
Le salarié conteste son licenciement en invoquant un état psychique altéré.
Il apporte la preuve qu’il a été hospitalisé sous contrainte pour troubles psychotiques le 17 mars 2019 et qu’il était en arrêt maladie lors du licenciement.
2. L’état de santé du salarié écarte toute faute grave
La cour d’appel juge que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, considérant que l’état mental du salarié l’empêchait de discerner la gravité de ses actes.
Les éléments médicaux relevés par les juges :
- Troubles du comportement avant son hospitalisation.
- Décompensation psychotique due à une rupture de traitement.
- Arrêt maladie et demande d’invalidité en cours.
Les juges estiment que l’employeur aurait dû engager une procédure d’inaptitude plutôt qu’un licenciement disciplinaire.
3. Confirmation de la Cour de cassation
La Cour de cassation valide la décision de la cour d’appel :
- Un salarié en état psychique altéré ne peut être tenu responsable de ses actes.
- Un licenciement pour faute grave suppose une imputabilité des faits, ici remise en cause.
4. Un licenciement non disciplinaire était envisageable
Face à des faits potentiellement graves, l’employeur doit assurer la protection des autres salariés.
Toutefois, dans un contexte de trouble mental avéré, un licenciement pour inaptitude aurait été plus adapté.
Une mise à pied conservatoire peut précéder une sanction autre que disciplinaire, comme :
- Un licenciement pour insuffisance professionnelle.
- Un licenciement pour inaptitude après procédure médicale.
Conclusion
Cet arrêt souligne l’importance, pour l’employeur, de tenir compte de l’état de santé mentale du salarié avant d’engager une procédure disciplinaire.
Cour de cassation, chambre sociale, 5 mars 2025, numéro 23-50022